Raphael Hefti - On Core / Encore

Entre altération et sublimation, l’œuvre de Raphael Hefti cherche à pénétrer la matière, à saisir l’âme encore inconnue des matériaux industriels.

À rebours des clichés qui enferment l’industrie dans une réalité rustre et rationnelle caractérisée par une aporie esthétique, l’artiste conduit des expérimentations qui convoquent la richesse des formes, des teintes, et leurs possibles transformations.

Tirés de leur sommeil, l’acier, le cuivre, l’aluminium, chauffés électriquement, se révèlent en forêts de structures tubulaires dotées d’une richesse chromatique imprévisible. Dans le vocabulaire plastique de Raphael Hefti, les verres antireflets accouchent de verres dichroïques, tandis que la combustion sporadique d’un papier photographique produit lentement et aléatoirement un photogramme oblong aux nébuleuses cosmiques, empreint d’une tension spatiale.

Consigner le mythe du matériau inerte.  Doter le processus même de transformation d’une teneur poétique. Faire de ces protocoles des alchimies. Dans un vacarme métallurgique, un cylindre d’acier cède, diaphane, à la précision implacable de la machine-outil qui le façonne sans cesse « on core », lancé dans une danse de mille formes « encore » avant de le réduire à néant. Là où la sensibilité et l’esthétisme n’ont pas leur place, émane pourtant une beauté assourdissante du spectacle.

Le résultat de ces expérimentations ne peut être interprété comme une collusion entre l’inerte et le vivant, le gris terne et la couleur vibrante. Ici, l’altération est amplifiée pour mieux faire exister ces transmutations qui s’opèrent au cœur de la matière ou en surface.

Loin d’abolir par l’esthétisme le caractère vil et industriel de ces matières ou de ces processus, l’artiste en exploite les possibles pour mieux le sublimer. Pour faire du procédé banal une fiction poétique.